+La voix de Dieu+
Nous arrivons enfin...bientôt au chapitre charnière. celui que j'apelle:"le chapitre où tout bascule" autrement dit l'élément déclencheur fait son apparition (roulement de tambour). j'espère que ça n'a pas été trop long (ne me lancez pas des tomates..du moins enlevez les conserves ;_;)
Préparez vos mouchoirs aussi, ça peut toujours servir.
Chapitre 19 :
Le voyage fut pénible et éreintant du moins pour toi. Max nous confia plus tard qu’il avait l’habitude de voyager avec son père archéologue et ne craignait donc point les flots impétueux. Il se levait chaque matin pimpant et frais pour une nouvelle journée alors que toi le roulis des vagues te procurait un raz de marée gastrique que tu devais souvent aller épancher par-dessus bord. Max était chaque fois à tes côtés, levant tes cheveux et caressant doucement ton dos courbé pour t’encourager. Il veillait aussi comme une mère poule à te réhydrater et à te nourrir convenablement et tu ne semblas pas t’amincir malgré tes fréquents vomissements. Mais outres ses soins physiques tendres nous le découvrîmes véritablement lors de cette traversée. Il restait souvent à tes côtés d’abord à une distance respectable pour ne pas t’effrayer puis ta confiance augmenta comme une petite graine, grosse comme un grain de moutarde pour finir par devenir aussi forte et vigoureuse qu’un cèdre du Liban quand tu finis par poser ta tête sur ses genoux. Si elle avait la force du cèdre elle en avait aussi sa fraîcheur et son apaisement. Je me surpris souvent à penser en vous regardant que vous étiez pour chacun de vous des oasis réciproques. Il se confiait à toi comme il ne l’avait jamais fait sachant qu’il n’était pas obliger de sourire ni de faire semblant, son âme s’ouvrait sous la douce pression de ton empathie. Quand à toi, je ne t’avais jamais vu tant rire aux éclats et plaisanter, la mélancolie si lourde qui te rongeait, semblait fondre sous la réconfortante chaleur de ses yeux verts. Il nous raconta sa vie passée en Finlande et sur la trace de trésors anciens avec son père. Nous fûmes avec lui quand il découvrit Miroir, son innocence, dans ce palais des milles et une nuit. Nous pleurâmes la mort de son père et l’abandon de sa mère. Nous portâmes avec lui sa si lourde malédiction et sa future rédemption. Je ne pouvais m’empêcher de sourire en vous regardant, là où l’attention d’Ael il y a quelques années m’avaient fait rentrer en rage, ici elle m’apportait joie et réconfort.
Je me réveillais souvent la nuit et surprenait Max dans ses nombreuses insomnies, vérifier si tes couvertures étaient toujours bien remontées et te scruter pendant un long moment puis son regard se perdait par le hublot dans l’immensité des flots baignée par la lumière blafarde de la lune. Son regard était impénétrable je ne parvenais pas à discerner ce qui s’y cachait. Quand j’y repense, aujourd’hui, se pourrait-il qu’il ait senti le destin tragique qui l’attendait dans un sursaut de clairvoyance ou dans une simple prémonition lugubre…
Les jours passèrent et nous accostâmes par un après-midi glacial et venteux du mois de décembre au Port de Saint Pétersbourg. Quand nous sortîmes de la calle qui nous servait de cabine nous fûmes estomaqués. La Neva se déployait devant nous comme un ruban de métal fondu perpétuellement agité par des impétueux ressacs et remous. Elle se cognait avec fracas le long des quais recouvert d’un majestueux granit gris formant ainsi une avenue principale où se pavanaient des somptueux édifices qui rivalisaient de beauté et de magnificence.
-« Bien les jeunes amoureux c’est ici que s’arrête notre traversée …Soyez prudents et que Dieu vous protège » le bourru capitaine avait prononcé ses recommandations d’une voix rude mais j’étais persuadé qu’il y avait placé toute la tendresse dont il était capable. A notre droite s’étendait le palais de Catherine la grande à gauche l’académie Impériale et l’université où se côtoyaient le fleuron de l’intellect et artistes russes. Max te prit la main pour t’aider à descendre sur le quai et il ne semblait décidé à la lâcher tu ne protestas pas te contentant de serrer la sienne plus fort et te parant de ton fameux sourire espiègle et énigmatique. Quand j’émis un huissement de taquinerie tu te retournas vers moi et me tira la langue comme une enfant de six ans, ce qui provoqua notre rire intérieur à tout les deux.
-« Lore pardonne moi pour cette question mais je ne comprends pourquoi tu veux retrouver ton père si il t’a… accusé de la mort de ta sœur ? » Nous marchions le long des quais nous pâmant sur la splendeur et les couleurs chatoyantes des bâtiments. Tu stoppas net ta marche et conscient de ton malaise soudain il se mordit la lèvre. Tu t’étais aussi confiée à lui du moins sur ton histoire avec ta moitié, ta sœur jumelle défunte.
-« Ma mère ma peu parler de mon père. Elle m’a juste dit qu’il était prêtre ici dans la Cathédrale Saint Andréa et qu’il était tombé fou amoureux d’une de ses paroissienne, ma mère. Elle était un écrivain très douée à L’académie mais une artiste quand même. Mon père provenait d’un milieu aisé. Pour vivre leur amour ils ont du fuir la noblesse et le Clergé, opposés tout deux à cette union…Même si il m’a accusé de meurtre pour pouvoir vaincre tout mes fantômes j’ai besoin d’être face à lui » J’étais si fière de toi. J’avais vécu 3 ans avec toi. J’avais vu ta peine et ton désespoir. Tes peurs et souvenirs sombres qui t’avaient contraint au mutisme pendant de longs mois et là tu étais devant moi; fière et droite ton regard et tout tes esprits fixés vers le but douloureux que tu t’étais fixé. Fière était un euphémisme et mon cœur se serra sous l’émotion. J’aurais voulu te prendre dans les bras que je n’avais pas mais c’est Max qui s’en chargea. Si vite que tu eus le souffle coupé. Il te serra contre lui tendrement, t’enlaçant de toute la force de son amour.
-« Max… ? »
-« Lore je…Tu es courageuse » Son ton était si doux et caressant que tu ne voyais rien à ajouter et te laissas aller contre son torse.
La cathédrale Saint Andréa resplendissait, d’une couleur rose pastelle. Elle dénotait étrangement de nos cathédrales austères avec leurs sombres clochers qui s’étiraient vers le ciel et leurs voûtes cachées dans l’obscurité poussiéreuse. Je m’étais posée sur ton épaule un faucon domestiqué attirait les regards dans une ville aussi populaire, cœur névralgique d’un Empire. C’est tout les trois que nous passâmes la lourde porte de chêne qui s’ouvrit dans un grincement, fatiguée par ses années de services. Tu vis un homme d’église affairé tout près des bougies. Il t’indiqua un bureau dans un des nombreux couloirs qui tels les bras d’une pieuvre s’étendaient de la saint Christie. Une autre porte se dressait devant nous lourdement ouvragée et auréolée d’or elle n’en demeurait pas moins lugubre et impersonnelle. Tu frappas d’un geste décidé .
-« Entrez » Le ton était froid et suffisant. Un homme d’une haute stature nous dévisageait derrière ses lunettes en demi lune. Ses habits étaient écoeurants d’être brillants et brodés de centaine de motifs, le satin et la soie étaient emprisonnés dans de compliquées arabesques par du lourd velours. De l’encens se consumait de chaque côté du bureau formant un écran de fumée autour du pompeux personnage. Ses mains boudinées tripotaient des papiers en faisant clinquer ses pesantes bagues d’or et de pierres précieuses.
-« Nous voudrions avoir des renseignements sur un prêtre qui travaillerait ou aurait travailler ici… »Malgré ses yeux perçants et porcins qui semblaient vouloir te foudroyer tu ne scias pas.
-« Comment s’apelle cette personne ? »
-« Alexander Daskania » Un grognement contrarié suivi par un rire gras et moqueur fut notre seule réponse. Quand enfin il réussit à reprendre son souffle en s’essuyant le coin de l’œil, il répondit d’une voix où perçait une pointe d’amusement :
-« aahhh oui ce brave Alexander…c’est dommage jeunes gens vous l’avez manqué de peu »
-« Il est parti ? »
-« Oui, les deux pieds devant il est mort il y a deux semaines…Il est sûrement en enfer avec tout les infidèles in vertueux et avec cette catin qui lui servait de femme. » Max s’était avancé d’un pas le regard menaçant tout en te retenant par le bras quand tu avais voulu réagir aux paroles calomnieuses du magistrat de Dieu.
-« Comment est-il mort ? »
-« De faim et de maladie, il voulait revenir parmis nous. Comme s’il eut été convenable de prendre en notre chère cathédrale un homme qui s’était corrompu avec une demie rien. J’ai donné l’ordre à chaque édifice religieux de lui fermer ses portes. Il a vécu comme un vagabond dans notre ville jusqu'à ce que qu’on nous ramène son corps il y a de ça 15 jours » Tu étais devenue aussi pâle que la neige qui s’était mise à tomber tourbillonnante en rafale. Tes yeux étaient redevenu ce puit vide et sans fond que je redoutais. Max te regardait horrifié il avait lui aussi aperçu ce changement. Dans un geste de consolation je frottais ma tête contre ta joue…Elle était glacée comme le granit des quais. Je me mis à trembler mais ce n’était pas ma réaction mais la tienne. Tes sobres sauts étaient tellement intenses qu’ils entraient mon corps dans une danse involontaire.
-« Lore ? » Silence lourd et inquiétant. J’aurai préféré que tu hurles que tu maudisses le Clergé plutôt que ce silence. Finalement ta voix s’éleva dans ma tête mais ce n’était pas ta voix… Elle était vide comme tes yeux, elle sonnait creus.
-« Alors c’est ça Armada…C’est ça la bonté de Dieu dont tu m’as tant parlé ? » Je suffoquais.
-« Lore je t’en pries ne confonds pas des réactions stupides et humaines avec la perfection de Dieu ! Même s’ils se disent représentant de Dieu, ils n’en restent pas moins imparfaits. LORE !! Ecoutes moi bon sang. »
-« Le Père Daskania est-il enterré quelque parts ? » Max s’était détourné de ton visage sans vie quelques secondes pour poser son regard froid sur l’homme dégoûtant qui nous regardait toujours avec beaucoup de curiosité.
-« Moui au cimetière de Smolensk, ce n’est pas très loin d’ici vers le nord ouest de la ville. C’est facilement trouv… » Il n’eut pas le temps d finir sa phrase que tu courrais déjà le long du couloir. Ta réaction avait été si vive que Max et moi étions restés interdits dans le bureau. Alors que tu franchissais déjà le seuil de la cathédrale. Sans un remerciement à cet homme libidineux nous nous lancions à ta poursuite. Le soir tombait et les rues se remplissaient des promeneurs s’amusant et bavardant, inconscients du drame que nous tentions Max et moi d’arrêter. Tu courrais décidément trop vite et Max malgré son effort soutenu ne parvenait pas à te rattraper. Je fonçais devant lui essayant de fendre la foule compacte. Quand je me retournais vers lui des larmes coulaient abondamment de ses beaux yeux verts, sa bouche, ses traits, s’étaient figés dans une expression de douleur intense. De toute évidence tout comme moi il avait senti la fatalité et le destin se mettrent en marche inexorablement. Je ne parvenais plus à ressentir tes émotions ni même à te parler par la pensée. Quand nous arrivâmes au cimetière nous nous figeâmes d’un commun mouvement. Max tomba sur les genoux le regard horrifié et la bouche tremblante. Tu étais toi aussi à genoux en face d’une pitoyable croix en bois, mémoire à un homme rejeté par les siens. Tu t’étais arrachée les cheveux par poignées entières qui jonchaient le sol, petits tas verts à tes pieds. Tu te lacérais les poignet avec un morceaux de verre comme si la douleur trop intense pour être contenue dans ton si fragile corps voulait à tout pris s’échapper de sa prison de chair. Le sang coulait le long de tes bras formant une rivière rouge et malsaine. L’image de notre première rencontre s’imposa à moi, ce même sang qui souillait ton corps d’enfant. Tu te retournas vers nous. Ton visage était pris dans la glace de l’effrois, figé à jamais par la perte de ton père. Seules tes larmes coulant sur tes pommettes nous rappelaient que tu n’étais pas une statue inerte. Puis soudain tu partis d’un rire, rire fou et dément se finissant en plainte longue et déraillées comme un loup hurlant à la lune. Nous étions arrivés trop tard…
Un homme brun à la peau mat se dressait devant toi, il murmura dans un souffle :
-« Les humains sont bien trop égoïstes et ignobles…N’est ce pas Loroleï ? »